Fanny de Chaillé : Avignon, une école

Avignon, une école est une plongée fascinante dans l'histoire du Festival d'Avignon, une exploration sensible et engagée du théâtre à travers les archives et les corps des jeunes interprètes. Fanny de Chaillé, artiste à la croisée des disciplines, s'empare du passé pour mieux interroger le présent et imaginer l'avenir.
Tout commence en 2020, lorsqu'elle est sollicitée par le Festival d'Automne à Paris et l'Adami pour travailler avec de jeunes acteur·ices fraîchement diplômé·e·s. Elle crée alors Le Choeur et découvre une faille : ces apprentis comédiens connaissent peu l'histoire de leur propre pratique. Elle entreprend donc de leur transmettre un héritage, d'explorer ce qui les a précédés, non pas comme un exercice académique, mais comme une matière à jouer et à s'approprier. Cette démarche aboutit à plusieurs créations, jusqu'à cette dernière aventure avec les étudiants de La Manufacture de Lausanne : Avignon, une école.

Ici, les archives du festival deviennent un terrain de jeu. Textes, sons, images... tout est matière à interrogation et transformation. Loin d'un hommage figé, le spectacle fait revivre les souvenirs, rejoue le passé pour mieux le comprendre et le confronter à aujourd'hui. Fanny de Chaillé et sa jeune troupe réactivent des traces, convoquent des figures théâtrales et questionnent ce que ce festival a été et ce qu'il peut encore transmettre.
Plutôt que d'éviter tensions et débats, Fanny de Chaillé les embrasse pour en faire une force créatrice. Car le théâtre n'est pas qu'un espace de communion, c'est aussi un lieu de friction et de remise en question. La célèbre citation de Jean Vilar prend ici tout son sens : "Le théâtre n'est pas là uniquement pour rassembler, il est aussi là, et surtout là, pour diviser, pour ouvrir une réflexion et un débat."
En s'ancrant dans l'histoire du Festival d'Avignon, Avignon, une école ne se contente pas de revisiter le passé : elle l'éprouve, le confronte et l'interroge. Fanny de Chaillé signe une oeuvre vibrante où la transmission devient un acte de création et où la mémoire du théâtre s'inscrit dans le corps et la voix de ces jeunes interprètes.

Olivier Frégaville-Gratian d'Amore