La place royale

Le spectacle vaut essentiellement par la prestation de Hélène Viviès (Angélique). Je n'avais pas été autant impressionné par le travail d'une comédienne depuis plusieurs années. Implication totale dans le personnage, très inventive et surprenante dans son corps et sa voix tout en restant toujours juste. Incandescente sans jamais tombé dans un pathos pataud. Mélange fascinant de maitrise et de lâcher prise. Sa performance est d'autant plus remarquable que le comédien jouant Alidor, à l'inverse, se perd dans le maniérisme et des émotions souvent à côté du texte. Il nous présente un Alidor confus et peu audible faute d'en avoir compris les rouages.

Hier soir j'ai à la fois découvert ce théâtre de l'Aquarium plein de charme et cette pièce de Corneille. Quelle langue ! L'auteur nous emmène avec délice dans les méandres, les labyrinthes des pensées humaines. La mise en scène est très originale et quoique résolument moderne est un bel écrin au texte. On est tour à tour ému, révolté, bousculé... mais jamais indifférent. Une mention particulière pour la jeune Hélène qui incarne avec justesse et une extrême sensibilité la belle Angélique. La scène finale est magnifique. Ce soir là beaucoup de jeunes et une écoute d'une grande intensité. C'est rassurant.

La langue sublime de Corneille est servie par une belle mise en scène moderne de François Rancillac. La musique des vers coule admirablement, avec parfois quelques accentuations sur les rimes. La troupe est parfaite, avec peut-être une petite préférence pour le couple Angélique - Alidor : Christophe Laparra est très expressif et fin, et Hélène Viviès apporte toute une palette d'émotion et sa grande élégance de comédienne. Les affres des personnages, si tourmentés, aux ambitions et espoirs apparemment si différents, aboutissent à un final réjouissant. L'intrigue est complexe et limpide à la fois.