Superbarrio

Jacques Hadjaje est un homme de théâtre accompli. Il n'est pas surprenant qu'il est travaillé avec jean Bellorini ("Liliom"), les ingrédients se ressemblent. Du grand et bon théâtre avec une histoire, des personnages, du foisonnement, de la luxuriance, des couleurs, un ange et de la musique... Celle ci est un bel élément qui accompagne le spectacle de manière fort agréable. Il manque un petit quelque chose pour nous empoigner complètement, nous émouvoir. Néanmoins, c'est bien joué, on suit avec intérêt ces gens et leurs histoires, les rebondissements. Et l'histoire est dans l'air du temps, indignés et nuit debout par exemple !

La compagnie des Camerluches et leur auteur -metteur en scène Jacques Hadjaje nous ont déjà offert de très beaux moments de théâtre ( Adèle a ses raisons , Dis leur que la vérité est belle, Entre temps j'ai continué à vivre ... ) Cette dernière création est tout aussi enthousiasmante que les précédentes . Superbarrio nous entraîne au Mexique ,pays du rêve et de la magie . Il a encore une âme d'enfant, une part de naïveté , il veut reconstruire son quartier, donner un sens à sa vie! On trouve de vrais sentiments , du rire , de la tendresse , une part de folie . La contrebasse contribue au rythme de cette mise en scène dynamique portée par des comédiens généreux et très talentueux . On a besoin de croire qu'il existe encore des "Superbarrio" Bravo les Camerluches !

Malgré une scénographie esthétique et un texte intéressant, l'interprétation des acteurs pêche, manquant de tripes et de subtilité. On s'attend à une atmosphère électrique des rues de Mexico, à côtoyer la sueur et la crasse des rings de catch, à être touché par les failles des personnages, mais rien de tout ça arrive et l'ennui prend vite le dessus.

Le projet intriguait. Nous faire découvrir un épisode réel de la vie mexicaine (dont je n'avais pas connaissance): celui de l'engagement d'un simple homme du peuple pour défendre les droits des sinistrés, laissés à l'abandon après le tremblement de terre de 1985, face à l'incurie, à la collusion et au cynisme des politiques et des "capitalistes". On reste un peu sur sa faim. Sans doute parce qu'on s'attendrait à une écriture à la couleur plus baroque, plus vive, plus foisonnante, plus excessive, pour traduire l'atmosphère du lieu, de l'époque et convaincre de l'embrasement des foules à la suite de Superbarrio et des pugilats qui s'ensuivirent entre détracteurs et soutiens. Pas assez de passion et d'excès et sans doute, pas assez de personnages et de situations variées, pour traduire l'embrasement qui donna naissance à ce mouvement. Les comédiens, dont certains incarnent plusieurs rôles, s'en sortent bien (un peu moins la "capitaliste" que l'on ne sent pas à l'aise dans ce rôle et donc, beaucoup moins crédible) Bonne utilisation du plateau avec une scénographie assez vive, plutôt bien pensée. Et l'apport de la contrebasse est une merveilleuse idée qui apporte beaucoup à ce spectacle. On aurait aimé être plus convaincu par cette pièce. Le conte social attendu n'a pas tout à fait fonctionné.